Acquis pour un prix estimé entre 50 et 60 millions d’euros, Timo Werner rejoindra cet été Chelsea en provenance de Leipzig. Avec 34 buts et 13 passes décisives, le joyau du RB Leipzig sort d’une saison plus que pleine. Comment se servira Chelsea de son nouveau goleador ?
T’as mis Abraham ?
Démarrer la saison 2019-2020 en ne pouvant se reposer que sur Tammy Abraham et Olivier Giroud au poste d’avant-centre suscitait, et c’est peu de le dire, un brin de doutes, voire de moqueries. Et le 4-0 pris d’entrée sur la pelouse de Manchester United n’avait rien arrangé. Certes, Abraham est un très bon finisseur. Ses mouvements dans la surface sont excellents et son physique est compatible avec le championnat anglais. Mais des incertitudes planaient autour de son jeu supposément prédictible, de sa faible capacité à peser sur le jeu en déviation ou en conservation dos au but et, tout simplement, de son standing pour un club qui vise le haut du tableau de Premier League.
Heureusement pour les Blues, d’immenses progrès ont été réalisés de ce côté-là à l’entraînement, et Tammy Abraham a su ajouter ces aspects du jeu à sa palette technique sans sacrifier ses points forts précédemment cités. Le bon travail d’Abraham et du staff transparaît dans les statistiques. Ses 13 buts en 27 matchs de championnat (0.6 but par match) complète un bilan satisfaisant pour un avant-centre de 22 ans chargé de telles responsabilités.
Frank Lampard, digne héritier du managérat à l’anglaise
La saison de Chelsea, qui ambitionne d’être plus tranquille que cela dans la course à la Ligue des Champions, reste, à certains égards, décevante. D’autant plus lorsque le monde se prend d’admiration pour les hauts standards affichés par Liverpool et Manchester City. Standards qu’ambitionne justement, après « beaucoup de travail », Frank Lampard. Si ce dernier peut envisager « beaucoup » de travail, c’est justement parce qu’il a reçu la confiance du club et devrait, sauf cataclysme, s’engager sur le long terme sur la route du succès pour Chelsea à la manière des managers typiques d’Angleterre.
Cela s’illustre particulièrement dans le rôle de tout premier plan qu’il a joué en vue des arrivées d’Hakim Ziyech et de Timo Werner. Désormais avec Ben Chilwell dans le viseur, ce sont bien les pistes de Lampard qui piloteront le mercato des Blues. L’ancien capitaine de légende devenu entraîneur est en pleine phase de déploiement d’un plan en trois ans qui doit repropulser Chelsea dans les concurrents au titre de Premier League.
Réformer l’attaque en faisait partie. En effet, et bien qu’il soit très friand d’Abraham, Lampard avait publiquement décelé l’inquiétante stérilité de son équipe, cherchant à y remédier dès le mercato d’hiver, en vain. Il aura donc fallu attendre l’été pour que Chelsea mène la charge. Avec les signatures de l’ailier star ajacide et du prolifique buteur lipsien, voici désormais chose vite et bien faite avec une construction d’équipe cohérente qui recrute bien et n’oublie pas l’académie. Une manière de faire affaire bien plus sérieuse que les « panic buys » de remplaçants dont Chelsea s’était rendu spécialiste ces dernières années.
Quelle équipe autour de Werner ?
Se pose maintenant la question de l’utilisation de ces nouveaux talents alors que l’on spécule sur un remaniement de l’attaque. Qui aligner de Timo Werner ou de Tammy Abraham ? Ou plutôt, car c’est évident que l’Allemand vient avec un statut d’indiscutable, l’arrivée du premier évince-t-elle obligatoirement le second ? En l’état, le 4-3-3 traditionnel de Chelsea n’offre une place qu’à un des deux buteurs. Timo Werner dans l’axe et Tammy Abraham en excellente solution de doublure, ce serait une véritable plus-value et c’est l’option qui se dégage naturellement.
Mais si l’on fait partie de ceux qui voient en cette option un certain gâchis des qualités de Tammy Abraham – voire une ingratitude –, il existe plusieurs mondes où l’on peut profiter des deux talents. Sans changer de formation, il est par exemple possible d’imaginer Werner sur l’aile gauche. L’attaquant s’y est retrouvé plusieurs fois que ce soit à Leipzig ou en sélection et sait aussi y faire parler sa créativité. Droitier, sa quasi ambidextrie est capable d’enrhumer son vis-à-vis et de se dégager aussi bien pour un centre que pour une frappe.
Le problème majeur de cette composition est qu’elle condamne Christian Pulisic au banc. Inconcevable tant le potentiel footballistique et économique de l’international américain (21 ans) pèse dans la balance. Pour lui trouver une solution, il faudra donc se montrer plus créatif et sortir du cadre du 4-3-3 pour un 4-4-2, qu’il soit en losange ou à plat. Et cela tombe bien, puisque Werner se montre plus convaincant dans une double pointe. L’animation entière de l’équipe serait alors à revoir, mais pour avoir le luxe d’admirer Abraham et Werner en même temps, le jeu pourrait en valoir la chandelle.
Une chose est sûre, Frank Lampard dispose d’une bonne dose de talents purs en attaque qu’il pourra modeler de bien des façons différentes. Durant ces prochaines années, et si le remaniement défensif se déroule correctement, il faudra beaucoup mieux considérer Chelsea pour la course au titre.