Dans un monde frappé par une pandémie jamais vue dans ce millénaire, le football, comme tous les autres acteurs de la vie économique, est en grande souffrance. En France plus qu’ailleurs, puisque la situation sanitaire du pays est telle que les footballeurs professionnels font partie des rares professions à ne pouvoir encore exercer – tout le moins en match officiel – sur le territoire. Mais la Covid-19 peut-elle permettre au football de se réinventer ? Oui, sans doute, en envisageant le télétravail pour les footballeurs.
Continuer d’exercer
Nombreuses sont les professions qui n’ont pas cessé d’exercer malgré la pandémie. Il y a bien sûr ceux que l’on voit : les agents de caisse, les livreurs, ou bien encore les chauffeurs de taxi et les personnels soignants. Il y a aussi ceux que l’on ne voit pas : dans les bureaux, les équipes marketing, comptabilité, ressources humaines, communication, ou encore contrôle de gestion de nombreuses entreprises ne sont pas à l’arrêt. Certaines travaillent même plus souvent qu’à leur tour. Pourtant, ils ne travaillent pas de la même manière qu’avant. Dans des conditions dégradées, bien souvent. Alors, pourquoi ne pourrait-on pas envisager la même chose pour les footballeurs professionnels ?
Car après tout, les acteurs du ballon rond ont une chance inouïe. Dans la catégorie des sportifs de haut niveau, ils cumulent plusieurs avantages non négligeables. D’abord, ils sont salariés. C’est un avantage absolument incroyable par rapport à nombre d’athlètes de sports individuels, comme par exemple au tennis, en athlétisme ou bien en natation. Mieux, ils n’ont pas de lourdes charges à payer, contrairement à ces derniers. Pas d’entraîneur à prendre en charge sur leurs maigres émoluments, pas de matériel dans lequel investir, pas de location de structures. En outre, bien qu’acteurs d’un sport collectif, ils peuvent pratiquer un entraînement individuel sans problème, bien que cela n’ait pas la richesse de la compréhension en direct. Enfin, ils bénéficient d’infrastructures qualitatives sur lesquelles s’appuyer, à travers l’encadrement du club.
Autant d’atouts qui font des footballeurs de haut niveau des sportifs privilégiés dans ce microcosme athlétique. Mais alors pourquoi, avec tous ces avantages, ne pourraient-ils pas télétravailler ?
Une première forme
Bien sûr, les footballeurs ne restent pas complètement inactifs depuis près de deux mois. Au contraire, nombreux sont ceux qui s’exercent au quotidien afin de ne pas perdre leur condition physique. Et c’est normal de ne pas vouloir faire partir en fumée des années de labeur à cause d’une période d’inactivité bien trop longue. De là à parler de télétravail ? Pas vraiment, parce que bien que les clubs leurs fournissent des entraînements à effectuer dans leur jardin ou autour du pâté de maison, il s’agit plus de maintien en condition physique que de réel entraînement basé sur ce que le joueur peut et doit produire en match. L’idée majeure à travers les entraînements proposés par les staffs des clubs est de ne pas retrouver des joueurs complètements « cuits » au bout de quelques séances d’entraînement. Il reste donc beaucoup d’espace pour le télétravail chez les footballeurs professionnels.
Il reste malgré tout à définir exactement la notion de télétravail. Pour beaucoup, ce terme est entré très récemment dans le vocabulaire. Pourtant, il s’agit d’un concept relativement ancien. Il n’y a même pas eu besoin d’attendre l’arrivée du Minitel dans les foyers français pour que le télétravail devienne une pratique courante, sous le nom vernaculaire de « travail à distance ». Un téléphone suffit pour rester en liaison avec ses collègues, et le tour est joué. Les commerciaux itinérants connaissent depuis de nombreuses décennies l’art de faire de l’administratif entre deux rendez-vous, sur une aire d’autoroute un peu louche entre Vichy et Mâcon.
Qu’est-ce que le télétravail, donc ? C’est tout simplement le fait d’accomplir à distance les tâches que l’on aurait pu réaliser en présentiel – tiens, encore un terme qui revient plus souvent dans nos bouches.
Mettre en place
La question principale concerne désormais la mise en place du télétravail chez les footballeurs professionnels. Elle n’est finalement pas très complexe à résoudre. Nous l’avons vu à l’instant, faire du télétravail ne signifie pas nécessairement avoir le nez vissé devant un écran d’ordinateur, à remplir des tableurs et à créer des diapositives. Ceux qui font ces tâches sont ceux qui réalisent déjà cela en temps normal. Pour le footballeur professionnel, le télétravail nécessite néanmoins un apport technologique. Car il est clair que par courrier postal, il est dur de juger de la qualité d’une série de pompes ou de la vitesse d’une accélération. Un ordinateur et une connexion internet seront les bienvenus.
Mais attention. Le télétravail chez les footballeurs ne se juge pas qu’à l’aune d’entraînements. Il peut et doit prendre une dimension plus intellectuelle. Car ces périodes sans entraînement collectif sont justement des périodes préférentielles pour la réalisation de séances personnalisées de réflexion. Les footballeurs doivent être en capacité de produire une réflexion adaptée sur leurs qualités individuelles et leurs objectifs.
Bien sûr, pour les entraîneurs, cela complique la tâche. Mais c’est justement le moment de rendre les footballeurs acteurs de leur progression. Le travail avec la vidéo peut être intensifié, et les joueurs ne doivent plus être simples spectateurs de ces séances si importantes pour eux, mais doivent co-construire leur progression avec l’aide de leur staff vidéo. Il s’agit vraiment d’optimiser les potentialités de cette période un petit peu étrange pour leur permettre de continuer leur progression et d’insister sur ce qu’ils n’ont pas le temps de faire à l’accoutumée. Se réinventer. Tout simplement.