« Premièrement, j’aime le jeu. Le football reste un spectacle et il faut donner du plaisir autant aux joueurs qu’aux spectateurs. Ma philosophie est de développer du jeu au maximum. » Ces mots, lâchés à Onze Mondial par Olivier Dall’Oglio, ne sont pas des paroles en l’air.
Le joueur ne fait pas l’entraîneur
Modeste joueur de deuxième division avec l’Olympique d’Alès, Strasbourg et Perpignan, Olivier Dall’Oglio ne fait connaissance avec la D1 qu’à la fin de sa carrière en participant à la montée du Stade Rennais. Le natif d’Alès est alors un défenseur rugueux assez loin de l’idéalisme du jeu. Suite à sa carrière de joueur prématurément interrompue par une rupture des ligaments croisés, Dall’Oglio fait la transition vers sa carrière de banc. Il passe d’abord un diplôme de formateur, ce qui retarde sa percée vers le monde managérial professionnel. Cela lui confère néanmoins d’autres avantages en vue du métier d’entraîneur, comme il l’explique au Temps.
« [Passer mon diplôme de formateur pour entraîner des jeunes] était une volonté de ma part. […] Cela a, à mon avis, trois avantages : on comprend mieux tout le cursus du joueur, on peut tester des choses, et c’est une très bonne école de management. »
Ainsi commence-t-il par entraîner des équipes de jeunes. Alès, Nîmes et Troyes bénéficient de ses services avant qu’il n’obtienne son BEPF et ne devienne donc entraîneur professionnel. Une fois n’est pas coutume, il débute sa nouvelle carrière dans sa ville natale par une pige à l’Olympique d’Alès en 2007. Il faudra attendre cependant quelques années – ponctuées d’une expérience en sélection nationale des Émirats – pour voir sa deuxième carrière décoller. C’est en effet en 2012 qu’il atterrit en Ligue 2 à Dijon. Club qu’il fera monter et maintiendra pour la première fois de son histoire en Ligue 1 en cinq ans de travail. Les projecteurs de la Ligue 1 trouvent alors un jeu insoupçonné pour un petit club à mettre en lumière. Si bien qu’un petit accident de parcours qui le voit démis de ses fonctions fin 2018 ne l’empêche pas de vite rebondir chez le promu Stade Brestois en 2019.
Mille sabords
Alors, qu’est-ce qui rend donc ce jeu si ambitieux et Brest l’une des plus belles équipes à voir jouer en Ligue 1 ? Nous répondrions, presque paradoxalement, par ses idées défensives. En effet, si ni le Dijon ni le Brest d’Olivier Dall’Oglio n’ont brillé pour leur défense, pas loin des standards de la relégation, c’est parce que le postulat est particulièrement ambitieux. C’est précisément ce qui le distingue de l’entraîneur type du ventre mou. Et ce n’est d’ailleurs pas pour rien que Gautier Larsonneur est très en vue cette saison.
Brest veut défendre en avançant pour récupérer haut, montant son bloc haut et jouant le piège du hors-jeu. Autre piège intéressant : celui de l’axe. Les Brestois aiment bloquer les ailes pour forcer les adversaires vers une ligne de passe axiale volontairement ouverte dans une fausse passivité. Là, le receveur est immédiatement pressé et contraint à perdre le ballon ou jouer en retrait sans pouvoir faire face au jeu. Problème, la faible densité du 4-4-2 peut prendre Brest à son propre jeu si le receveur est doué techniquement.
Tonnerre de Brest
Plus d’un entraîneur aurait abandonné l’idée afin de plutôt « bétonner » derrière. Mais ce dispositif défensif, aussi friable puisse-t-il être par moment, est la base de l’idée offensive d’Olivier Dall’Oglio. Celle de relancer au sol. Si le Brest qui défend est un 4-4-2 assez stable, le Brest attaquant se projette dans un 4-2-3-1 beaucoup plus fluide. L’accent est mis sur le mouvement, latéralement comme verticalement.
Il faut aller vers l’avant le plus vite possible en privilégiant le jeu au sol sans s’interdire le jeu long, notamment latéralement pour renverser le jeu. Pour amener le ballon dans la surface, les latéraux jouissent de consignes très permissives et la liberté est de mise dans toutes les permutations. Beaucoup de solutions sont ainsi offertes au porteur de balle et, s’il y a souvent la volonté d’aller chercher à l’opposé pour créer de gros décalages, il n’est pas rare d’observer des extraits de tiki-taka au fil d’un match.
Le Stade Brestois ne reste qu’un promu. Et si les qualités technique ou mentale relativement limitées à ce niveau peuvent les rattraper par moment, les Brestois savent où ils vont, et comment.
De l’ambition où il n’y en avait pas
Adepte de l’intellectualisation du football, cette sensation de voir un joueur ne sachant que faire du ballon est beaucoup moins présente en regardant les équipes d’Olivier Dall’Oglio. On en revient donc au sens du spectacle dans le football et chez les clubs du milieu ou bas de tableau. L’intérêt de mieux penser et jouer le football est triple. D’abord, cela risque d’apporter des résultats. Ensuite, un groupe qui prend du plaisir est moins sujet à la morosité engendrant des séries catastrophiques comme celle de Toulouse cette saison et facilite donc le maintien. Enfin, mieux jouer au football permet d’attirer les supporters de la région. D’autant plus lorsqu’on ne peut leur promettre des trophées ou des coupes d’Europe et quand on ne se trouve pas dans une ville qui priorise le football.
Le maintien dans l’élite du football français était déjà un résultat très satisfaisant pour Dijon et Brest. Mais Olivier Dall’Oglio leur a ajouté quelque chose d’autre dans le panier, quelque chose de peut-être encore plus important : l’envie d’aller au stade. Sa longévité à Dijon en atteste, Dall’Oglio pense la deuxième partie de tableau autrement, et mieux. Et sa première à Brest, qui devrait s’assurer un maintien tranquille en plus de quelques matchs références et des révélations comme Mathias Autret ou Romain Perraud, est très prometteuse. Olivier Dall’Oglio offre à ses clubs un jeu attrayant et donc une existence médiatique supérieure à celle des autres clubs de ce niveau. On ne peut donc qu’avoir envie de le voir évoluer au sein d’un projet plus ambitieux.