Hans-Dieter Flick, ou Hansi pour les intimes, ne devait être qu’un adjoint au Bayern Munich. Puis il était censé n’être qu’un intérimaire. Mais dirigeants et supporters ont jugé son travail si bon qu’il a finalement paraphé un contrat d’entraîneur principal jusqu’en 2023. Comment s’y est-il pris pour revigorer le Rekordmeister ?
22, v’là Hansi Flick
C’était il y a une éternité. La saison 2019-2020 commençait avec Niko Kovač mais allait vite tourner court. Alors que le Borussia Mönchengladbach démarrait sur les chapeaux de roue et menait la Bundesliga, le Bayern Munich, pour la deuxième fois consécutive avec le technicien croate, connaissait un début de saison compliqué. Avec un vestiaire aussi déçu du jeu proposé que les supporters et les observateurs, les résultats relevaient désormais également de la déception. Mais cette fois, on ne laissera pas à Kovač le soin de réparer un nouveau début de saison laborieux : une lourde défaite face à l’Eintracht Frankfurt – son ancien club – lors de la dixième journée aura raison de son poste.
Entre alors Hans-Dieter Flick, directement promu de son rôle d’adjoint. Un costume dans lequel il a effectué la majeure partie de sa carrière. En effet, s’il a débuté sa deuxième carrière en tant qu’entraîneur du FC Bammental en 1996 puis du TSG Hoffenheim de 2000 à 2005, c’est en adjoint du RB Salzburg puis de la sélection allemande de 2006 à 2014 – avec les résultats qu’on lui connaît – que Flick se fait un nom. Il découvre ensuite le poste de dirigeant, toujours en sélection à la DFB jusqu’en 2017 puis de nouveau à Hoffenheim durant l’ère Nagelsmann. Ce qui nous amène à l’été 2019 où Flick retrouve un club qu’il a connu en tant que joueur puisqu’il rejoint le Bayern Munich au poste d’adjoint avant de prendre de manière assez inattendue les rennes du groupe professionnel.
Le nouveau Jupp Heynckes ?
Le premier contraste entre les coachs Niko Kovač et Hansi Flick sont leurs différents principes de jeu. Le Croate axait son jeu sur la solidité défensive mais on observait un manque cruel de créativité, surtout à la récupération du ballon, à cause tout simplement d’un manque d’idées et donc de consignes. Ce manque est précisément ce qui lui a fait perdre la confiance d’un vestiaire qui avait en partie connu Guardiola. Hans-Dieter Flick est quant à lui plus rassurant. Il prône un jeu plus rapide, plus vertical et clairement axé sur l’offensive. Ce n’est pas du jeu de position, mais c’est déjà plus clair et plus digne de l’ADN du Bayern. C’est ce que Thomas Müller, revitalisé depuis l’arrivée de Flick, expliquera dans une déclaration aussi évocatrice que discutable.
« Si ta femme t’envoie faire des courses avec une liste, tu sais exactement quoi faire. Mais si elle ne te donne pas de consignes claires, alors il y a des chances pour que tu restes face aux rayons et que le repas ne soit pas réussi. » Propos de Thomas Müller relayés par RMC Sport.
Rassurant et aimé, si Hansi Flick était déjà populaire en tant qu’adjoint, il a totalement conquis les joueurs, a fédéré un groupe perdu et est devenu bien plus qu’un intérim. Proche des joueurs qu’il fait passer avant les idées, le parallèle avec Jupp Heynckes est vite dressé. D’ailleurs, la renaissance du Bayern s’illustre par les joueurs plus que par une nouvelle manière de jouer. Bien qu’il y ait eu des changements fondamentaux, on retient bien plus le renouveau de Thomas Müller et de Thiago Alcantara ou l’avènement d’Alphonso Davies.
Retour aux fondamentaux
En parlant de changements tactiques fondamentaux depuis l’arrivée de Flick à son poste, le principal s’exerce dans la progression balle au pied. Hansi Flick met en place un 4-3-3 avec un numéro 6 (Joshua Kimmich) très bas pour étirer le jeu. Car cela permet effectivement aux deux centraux de s’excentrer et aux latéraux de prendre le large. La destruction du pressing adverse est facilitée. Ainsi, les centraux ont un rôle déterminant. Option privilégiée de la relance, leur talent balle au pied est primordial. C’est probablement ce qui explique le repositionnement dans l’axe de David Alaba, même si l’explosion de Davies et la longue blessure aux ligaments croisés de Süle l’encouragent aussi.
En recevant le cuir des soins de Neuer, les centraux ont trois options de transmission : le 6 ou le 8 et le latéral les plus proches. C’est assez simple mais c’est une bonne manière de créer la supériorité numérique contre un pressing et de permettre un jeu vertical. Une supériorité qui se traduit vers l’avant, puisque quelques passes directes et dédoublements bien travaillés entre les relayeurs – ou les latéraux – et les ailiers, très enclins à occuper les halfspaces, permettent d’atteindre la surface.
La défense du Bayern façon Hansi Flick s’articule autour d’un pressing à la relance. Il s’agit de fermer les lignes de passes menant aux latéraux pour piéger l’adversaire à l’intérieur du jeu voire, au mieux, forcer le jeu long. En revanche, on observe l’exacte inverse quand les Munichois défendent dans leur dernier tiers. Là, ils décident d’enfermer le porteur sur le flanc en créant une grosse supériorité numérique autour de lui, au risque de faire pencher l’équipe un peu trop vers le ballon et de s’exposer aux renversements de jeu.
Des chiffres éloquents
Pas révolutionnaire, les préceptes d’Hansi Flick ont néanmoins des résultats probants et les chiffres finissent de nous en convaincre. Sur la demi-saison, la comparaison avec Niko Kovač est sans appel. Le Bayern inscrivait 2,5 buts par match et en encaissait 1,6 avec le coach croate. Il en marque avec Flick 3 et n’en concède que 0,85. Des chiffres qui se traduisent aussi par les expected goals sur la période. Au niveau des buts marqués, on compte 2,07 avant Flick puis 2,65 xG ; quant aux buts encaissés, on passe de 1,6 à 0,85 xGA.
Logiquement, le Bayern Munich tire plus (19,3 contre 16,6 tirs par match) et mieux (8,3 tirs cadrés par match contre 6,8). Et si les Roten concèdent un peu plus de tirs par match (9,9 contre 9,7), ils forcent en fait l’adversaire à des tirs plus hasardeux, comme le montre la statistique des tirs cadrés encaissés par match (3,7 contre 4,5). Tout ceci se transcrit jusque dans les résultats. Avec 2,14 points par match contre 1,8, le Rekordmeister a tout bonnement repris sa première place avant la pause forcée par l’épidémie du coronavirus.