La nouvelle année est arrivée et avec elle son lot de bonnes habitudes que des millions de personnes se jurent de prendre et de garder à partir de maintenant et ce, afin d’améliorer leur qualité de vie. Et si le football en faisait de même ?
La nécessité de changements
Alors, pourquoi faire, me diriez-vous ? Il est vrai que clubs et supporters – ou du moins fans de football –, y compris votre humble serviteur, s’accordent bien souvent dans une direction à propos du football. Celle du conservatisme. Chaque réforme apporte son lot de complaintes et chaque réunion de l’ECA certaines crispations. Pourtant, si le football était une société anonyme comme une autre sans âme particulière, tout pointerait vers la nécessité d’un changement. Plusieurs, même.
Les chiffres de l’exercice précédent, d’abord, sont assez décevants du point de vue de l’engouement populaire. En 2018-2019, la Ligue des Champions a rassemblé en moyenne 1,3 milliard de personnes en direct. C’est beaucoup. Mais c’est moins que la moyenne des trois saisons précédentes qui s’élevait à 2 milliards. La plus célèbre des compétitions de club a donc vu son audience baisser de 35% en un an. Sa petite sœur, l’Europa League, affiche aussi un recul de 17% dans ce domaine. Cela fait tâche quand on sait que les clubs et les ligues tirent désormais la majeure partie de leurs revenus via les contrats de droits télévisuels. Et comme la tendance semble continuer durant la campagne européenne actuelle et que l’inflation des transferts ne connait pas de répit, il pourrait y avoir urgence à pas si long terme.
Le football doit aussi changer, et ce point plaira moins aux « vrais » fans mais explique le premier, car les modes de consommations ont drastiquement changé avec la nouvelle génération. Le temps d’attention avant de plonger dans ses réseaux sociaux est devenu très faible. On estime que les moins de trente ans consultent leur téléphone en moyenne toutes les trente minutes. Il n’est pas question ici de faire le procès de ces nouvelles habitudes. Nous ne sommes personne pour dire si c’était mieux ou pire avant. Toujours est-il que ce n’est pas bon pour le business du football.
Car si le spectateur regarde grand minimum une fois par mi-temps son smartphone et que le match n’est pas palpitant à ce moment-là, pourquoi lâcherait-il son outil connecté ? Tout le monde n’a pas l’envie ou les connaissances pour analyser les blocs et intervalles des deux équipes chaque seconde, seul aspect intéressant lorsque « les défenseurs jouent à la baballe derrière ». Les instances vont donc vouloir capter plus fort et plus longtemps notre attention. Et cela pourrait passer par un jeu rendu plus vif, spectaculaire, intense, fluide. Si les audiences venaient encore à empirer, je ne donnerais pas cher de la peau du format onze contre onze, grand terrain sur quatre-vingt-dix minutes.
Les bonnes résolutions
Comme dit plus haut, votre serviteur est lui-même plutôt conservateur pour ce qui touche au football. Ici n’est donc pas l’article où l’on vous propose un nouveau football à sept contre sept sur petit terrain muré, le tout en quarts-temps et avec goals-volants. Voilà donc deux propositions beaucoup plus sobres pour booster à la fois audiences et plaisir dès maintenant.
Plus de football en clair
Oui, la proposition peut avoir l’air d’une invitation au monde des Bisounours de la part d’un fan lassé de payer x abonnements par saison. Elle est aussi en totale opposition avec la tendance actuelle. En effet, la saison prochaine, pas moins de cinq (!) diffuseurs payants – en plus de France Télévision – se disputeront vos faveurs sur les droits des neuf compétitions que l’on pourrait qualifier de « base » : Ligue 1 et 2, Coupe de France, Ligue des Champions, Europa League, Premier League, Liga, Bundesliga, Serie A.
Pourtant, basculer au minimum certains matchs de certaines compétitions vers la télévision gratuite aurait un vrai intérêt économique. Principalement parce qu’il faut visiblement attirer de nouveaux spectateurs. Quoi de mieux pour cela qu’un match en prime-time sur une chaîne gratuite en guise de référentiel commun à des milliers d’enfants pour débattre dans la cour. Ces premiers rapports au football étaient par exemple une véritable porte d’entrée vers ce monde dans la France des années 2000, quand TF1 possédait la Ligue des Champions. Toujours en ce qui concerne la France, mais le cas est reproductible, reconduire cela aujourd’hui serait bénéfique à toutes les parties. D’autant que RMC et Canal disposent déjà de chaînes sur la TNT. Inévitablement, plus de vocations se créeraient. Et plus ces enfants, une fois adulte, seraient enclins à s’abonner à une chaîne de sport payante.
Va VAR ailleurs si j’y suis
L’implantation de la VAR mériterait un article entier. D’ailleurs, nous vous en parlions déjà il y a plus de six mois. Avec cette nouvelle technologie, le football renonce à un peu de sa dramaturgie pour plus de justice. Nous n’avons eu ni l’un, ni l’autre. Entre hors-jeux décidés au pixel près alors que les outils ne permettent pas une telle précision (pour rappel, les matchs sont capturés à 24 ou 30 images par secondes, puisque la VAR a les mêmes images que la TV), et mains dans la surface sifflées à Londres mais pas à Rennes d’un week-end à l’autre, la VAR a créé beaucoup plus de débats qu’elle n’en a résolus.
Et par-dessus le marché, nous ne célébrons plus les buts avec autant de joie – pour ceux qui les célèbrent encore… Voilà une drôle d’idée, alors que les audiences baissent, d’importuner les spectateurs et de nuire à leurs émotions. Difficile de dire si l’implantation de la VAR a déjà dégouté des fans de football au point de les détourner complètement de la discipline. Mais il est sans risque d’affirmer que la VAR n’est plaisante pour personne, qu’elle avantage ou non le club aimé sur le moment. Ce doit même être le cas pour les arbitres, car ceux-ci ont été déresponsabilisés au point de parfois devoir s’abstenir.
Pour autant, pointer l’utilisation qu’on fait de cette technologie comme le vrai problème est, je pense, une erreur. La VAR elle-même est le cœur du problème. C’est bien le fait que la VAR existe qui pousse les arbitres à l’utiliser comme pouvoir omniscient à même de décider de tout. Ainsi, la seconde réforme proposée ici n’est ni plus ni moins que la suppression de la VAR. Et ce, le plus tôt possible. Les clubs doivent se réunir et bien admettre que cette situation est désastreuse pour tout le monde. Que le retrait de la VAR en pleine saison pose des problèmes d’équité, peut-être. Mais ce qui est certain, c’est qu’il y a là une chose que l’on ne voudra pas voir de nouveau en 2021.