Récemment débarqué sur la Promenade des Anglais, le champion du monde 98 version coach est méconnu, et pour cause : il a fait ses premières classes outre-Atlantique, en MLS. Retour sur la reconversion d’un des meilleurs milieux de terrain de l’histoire en tacticien prometteur.
Une transition en douceur
Juillet 2011. Après une ultime et maussade saison chez les Citizens où Patrick Vieira n’a pas la confiance du coach Mancini et où ses apparitions se font rares, l’ex-international français met un terme à sa carrière de joueur. Mais loin de lui l’idée de s’éloigner du football : il reste à Manchester dès la saison suivante en tant qu’ambassadeur pour le club au Royaume-Uni et à l’étranger, bénéficiant en outre d’un rôle dans la formation des jeunes mancuniens.
Les choses sérieuses commencent deux ans plus tard, détenteur d’un diplôme UEFA B et enrichi de cette nouvelle expérience, il prend les rênes de l’équipe réserve U21 de Manchester City. Il peut ainsi continuer à se former tout en formant les jeunes. Puis c’est encore deux ans plus tard que Patrick Vieira franchit un nouveau palier en étant nommé entraîneur de l’équipe première du New York City FC. Annoncé fin 2015, il est comme prévu mis à la tête de l’équipe des certains David Villa, Andrea Pirlo et Frank Lampard (excusez du peu) en janvier 2016, soit à la présaison américaine, la MLS ayant lieu de mars à décembre.
New York, New York
Pour ceux qui ne seraient pas familiers avec les sports collectifs américains, la MLS suit le modèle de la NBA et de la NHL (entre autres), à savoir une ligue fermée où les franchises payent pour entrer, sans système de promotion-relégation, se déroulant dans un premier temps comme un championnat européen : en classement. Mais comme organiser un Bordeaux-Montpellier n’est pas du même acabit qu’un New York-Los Angeles, la compétition se divise en deux conférences de onze équipes : ouest et est, même s’il y a quand même des rencontres entre orientaux et occidentaux. Les six meilleures équipes de chaque conférence s’engagent alors dans une sorte de phase à élimination directe (play-offs), enfin, les vainqueurs des deux finales dites “finales de conférence” s’affrontent alors dans une vraie finale qui détermine le vainqueur de la MLS. Au cas où vous vous demanderiez : non, il n’y avait visiblement pas plus simple à organiser pour les Américains…
Si l’on revient à notre cher Patrick Vieira, il lui était donc demandé de qualifier les New-Yorkais dans ces fameuses play-offs pour la première fois de leur (courte) histoire. Il s’agit là d’un objectif hautement ambitieux, le prédécesseur de l’ancien Gunner n’ayant atteint que la huitième place. Grâce aux fonds importants des propriétaires qui ne sont autres que ceux de Manchester City, le natif de Dakar réalise un premier mercato haut en couleur, signant dix nouveaux joueurs et enregistrant onze départs. Sa principale tâche à New York est donc de faire jouer les jeunes et les stars Lampard, Pirlo et Villa dans un système efficace.
Merci Villa ?
La première saison de Patrick Vieira démarre sur les chapeaux de roue en partie grâce à un excellent David Villa : le NYCFC est premier de la conférence Est en été. Cela s’avère être une réussite : il sera deuxième à la fin de la saison régulière, se qualifiant ainsi pour les play-offs malgré la blessure de Lampard. En outre, coach Vieira a déjà démontré ses forces en management avec la décision de ne pas titulariser Pirlo à plusieurs reprises pour des raisons purement sportives. La saison des New-Yorkais s’arrête après une belle demi-finale de conférence, et est très prometteuse pour la suite.
Faisant l’unanimité en interne, Patrick Vieira est maintenu sur le banc du NYCFC pour la saison 2017, laquelle étant très similaire à la précédente : là aussi, une deuxième place de conférence, là aussi, un David Villa en feu, là aussi, l’aventure s’arrête en demi-finale de conférence. Ce qui nous amène en 2018, pour sa dernière saison de contrat avec le NYCFC et toujours animé par la passion du projet new-yorkais, Vieira déclare avant le début de la saison vouloir jouer le titre grâce à l’apport de stabilité offensive ET défensive et toujours en s’appuyant sur l’Espagnol, mais avec d’autres renforts à l’intersaison tels que Medina et Tinnerholm. Sur la lancée progressive de ses 2 premières années, la saison régulière new-yorkaise est toujours aussi bonne, trustant les premières places avec Atlanta et les Red Bulls New York. Seulement, il ne jouera pas les play-offs 2018 car, d’abord annoncé dans le viseur de Saint-Etienne ou Arsenal, c’est à Nice qu’il s’engage à l’intersaison européenne.
Vieira Nissa
Sur le banc des Aiglons, il est clair que remplacer Lucien Favre ne va pas être une mince affaire : entre le jeu très agréable mis en place et le périple du GYM en Ligue 1 2016/2017, le tacticien suisse a laissé son empreinte sur la Riviera. Alors à quoi peut-on s’attendre avec Patrick Vieira ? Tout d’abord, il faut savoir que sa philosophie de jeu en tant qu’entraîneur se rapproche beaucoup de sa propre philosophie en tant que joueur : c’est-à-dire aligner des joueurs alliant qualités physiques et prouesses techniques. Mais ne vous y méprenez pas, nous n’avons pas affaire au classique coach moyen de Ligue 2 qui préfère les vigiles aux artistes : un entraîneur formé au sein de la “City Holding” est forcément partisan de la construction propre, artistique du jeu (la signature de Guardiola à City étant le paroxysme de ce que les dirigeants souhaitaient mettre en place).
En effet, amener le ballon dans la surface adverse par le sol grâce à une bonne vision du jeu est la priorité pour Vieira. Il n’hésite pas à demander à ses équipes de passer par le gardien pour débuter une phase de possession, ce qui force l’adversaire à avancer, puis, grâce à son milieu clef (Pirlo à New York), l’offensive s’accélère donc par une passe verticale sur les ailes, l’ailier profite alors du repli adverse pour entamer un 1 contre 1 face au latéral, enfin, les courses des autres attaquants dans l’espace créé mènent souvent à une occasion de but.
Fidèle à sa formation préférée à New York, Vieira devrait mettre en place à Nice un 433 dont le trident offensif sera sûrement composé de Saint-Maximin, Balotelli ou Srarfi ou Maolida, et Lees-Melou. L’utilisation d’un 4231 n’est pas à exclure cependant, elle permettrait de mieux faire face aux contre-attaques sans sacrifier la construction. A l’image de son travail avec notamment Jack Harrison et Yangel Herrera, le vainqueur de l’Euro 2000 est aussi un partisan du développement des jeunes, une image qui colle bien à l’ADN niçois, dont une des plus belles réussites est l’éclosion d’Hugo Lloris l’ayant mené jusqu’au sacre mondial.