Alors que nous sommes en pleine Coupe du Monde et que les phases à élimination directe vont bientôt commencer, plusieurs questions surgissent. Les temps additionnels sont ils exacts ? L’arbitrage vidéo fait-il perdre du temps de jeu effectif ? Éléments de réponse.
Beaucoup de matchs ont un temps additionnel inférieur au temps réel arrêté. En effet, l’arbitre ne prend bien souvent pas la pleine mesure des arrêts de jeu. Le match Maroc-Iran, dans lequel six minutes de temps additionnel ont été données par l’arbitre, comptait ainsi quatorze minutes d’arrêts de jeu. Cette imprécision n’est pas un hasard. En effet, le football, au contraire du beach soccer par exemple, utilise un temps de jeu non-fixe. C’est aussi une des réticences qu’émettent les nord-américains face au soccer. Les joueurs sont parfaitement conscients de cela : les gains de temps sont efficaces parce que les joueurs savent que l’arbitre ne mettra pas autant de temps que ce qu’ils ont perdu.
Mais afin de se rendre compte de l’ampleur du phénomène, il faut mesurer les temps de jeu effectifs lors des matchs. L’an dernier, une étude sur le match entre Southampton et Arsenal avait abouti à un temps de jeu effectif de cinquante-huit minutes. En Ligue 1, quelques études avaient donné des résultats oscillant entre quarante-cinq et soixante-dix minutes selon la méthodologie employée. Qu’en est-il vraiment à la Coupe du Monde ? C’est ce que Jacoba Gundle, Andrez Guerrero, Angel Gutierrez, Dan McDowell, Rick Dunning et Wade Starnes ont tenté de mesurer.
Pas assez de temps en plus
Il n’y a pas assez de temps additionnel, c’est un constat. Mais dans quelle mesure cela est-il vrai lors de ce mondial ? En fait, cela est vrai pour tous les matchs… sauf un. En effet, lors d’Allemagne – Suède, un match où il y a eu un peu plus d’une heure de temps de jeu effectif, M. Marciniak, l’arbitre polonais, a donné exactement le bon temps additionnel à deux secondes près. Le match s’est d’ailleurs heureusement conclu pour l’Allemagne, grâce à ce temps en plus principalement.
Cela dit, il ne faut pas confondre temps où la balle est en jeu et temps additionnel. En effet, certaines interruptions ne doivent être ajoutées que si elles dépassent vraiment la routine. Ainsi, on peut déterminer des temps maximums pour chaque action de jeu dans un match. Une touche ne devrait pas dépasser vingt secondes, un carton jaune ou un six mètres trente, un corner quarante-cinq secondes et les altercations ou les contestations et discussions avec l’arbitre trente. Les phases les plus chronophages en temps normal sont les coups-francs et les penaltys. Mais ils ne devraient pas dépasser une minute dans leur exécution.
Ainsi, en prenant en compte ces éléments, on arrive à des temps additionnels très différents de la réalité. Le record dans ce mondial se situe dans l’affrontement entre la Belgique et la Tunisie. En effet, l’arbitre a accordé exactement sept minutes et quatorze secondes en plus, alors que les arrêts de jeu additionnés auraient dû porter ce total à vingt minutes et cinquante-huit secondes exactement.
Des phases chronophages
Parmi les phases chronophages, certaines le sont plus que d’autres. Et contrairement à ce qu’affirment les « antis » de l’arbitrage vidéo, ce ne sont pas les phases de VAR qui hachent le plus le jeu. En effet, leur rareté empêche à ces séquences d’avoir une trop grosse influence sur le jeu. Non, les phases les plus longues sont les coups-francs, que ce soit par leur nombre élevé dans un match (on peut difficilement avoir moins d’une quinzaine de coups-francs dans un match, et le chiffre peut monter jusqu’à une cinquantaine).
Le tableau ci-contre expose le temps moyen cumulé de chacune de ces phases au cours d’un match moyen. On peut ainsi observer que les phases de coup-franc dominent très largement. Pour gagner du temps de jeu effectif, il paraît donc essentiel de diminuer le temps sur chacun des coups-francs. Il en va cela dit de même pour les touches, qui sont tout aussi chronophage. Et cela ne devrait pas aller en s’améliorant avec la prolifération des touches longues, popularisées par l’Islande au cours de l’Euro 2016 en France. L’écart entre les différentes situations est encore plus flagrant dans le graphique ci-dessous. Plus de 10% du match est passé dans l’attente d’un coup-franc à frapper ! Il est du devoir des arbitres de presser un peu plus les joueurs à la frappe des coups-francs, notamment ceux situés dans les zones défensives qui sont parfois plus longs que ceux aux abords de la surface.
Excusons les arbitres
Il ne faut pas néanmoins reporter toute la faute sur les arbitres. En effet, les temps additionnels, à l’exception de quatre matchs sur trente-deux dans ce mondial, auraient dû dépasser, souvent allègrement, les dix minutes. Hors, rares sont les personnes ayant déjà vu un panneau de temps additionnel dépasser sept ou huit minutes. Et on voit les polémiques créées par la chose lors de RCSA – PSG par exemple. Pourtant, 43% du temps du match est passé à attendre… et non pas à jouer.
Alors que faire ? Plusieurs solutions co-existent. La plus simple est sans doute de punir très sévèrement tout gain de temps (remplacer le jaune par un rouge direct, faire respecter les durées prescrites plus haut). Mais punition ne remplace pas prévention. Alors il faudrait prévoir sans doute un meilleur décompte de la part de l’arbitre assistant, en mettant un temps de jeu réel (en laissant le temps des remises en jeu), ou bien en calculant réellement le temps à ajouter lors de chaque arrêt de jeu.
Aucune méthode n’est actuellement parfaite. Néanmoins, il est du devoir de la FIFA de se pencher sur le sujet. A l’heure où le football tente de conquérir le marché nord-américain, c’est en effet une chose essentielle… pour les diffuseurs télévisés et leurs publicités !