Un carré a quatre angles, et un triangle a trois coins. Placez désormais un triangle en face d’une boussole, les pointes orientées dans le même sens que la flèche. Le triangle que vous obtiendrez aura donc un angle à l’est, un autre à l’ouest, et surtout un au nord. C’est à ce coin nord que nous allons nous intéresser. Et pas n’importe lequel ; le coin nord de Mitsamiouli. Vous ne savez pas où cela ce situe ? Eh bien, partons dans ce nouvel épisode de Tour du Monde à la découverte du Coin Nord de Mistamiouli, un fameux club de football des Comores.
Les pirogues du coin nord
L’île de Mitsamiouli se situe dans l’archipel des grandes Comores, au large de l’Afrique. C’est une des îles les plus riches de l’archipel, puisqu’elle compte en effet les principaux endroits touristiques. On y trouve par exemple de nombreux hôtels. Et surtout de splendides plages de sable fin, blanc et chaud (sauf quand il pleut). Mais l’île a aussi un patrimoine culturel fortement développé, puisqu’elle comprend en son sein des restes des palais des sultans de la région. Tout ça avec seulement une population comprise entre 7 000 et 8 000 habitants.
Mais ce statut privilégié n’est pas le cas de tout l’archipel des Comores. En effet, l’IDH de l’Union des Comores est parmi les plus faibles du monde. Il n’est en effet égal qu’à un peu plus de 0,4. Quand par exemple celui de l’Iran pointe aux alentours de 0,7. De même, le PIB en parité pouvoir d’achat est le 106e du monde. Soit un PIB moyen par rapport aux Etats mondiaux, mais faible par rapport aux critères de développement établis par l’ONU.
Equipés du Franc Comorien, l’Archipel des Comores est scindé en deux parties : une française (Mayotte), et l’autre indépendante. Et c’est cette partie indépendante qui attire les foudres de l’ONU, qui, a plus de vingt reprises, a condamné le pays au vu des normes internationales. Tout ça en ayant changé cinq fois de drapeau depuis 1975.
Au coin nord , il y a des bantous
Le peuplement des Comores est majoritairement, notamment à Mitsamiouli, d’origine bantoue. On y trouve également une forte population d’origine arabe, ainsi qu’un assez grand groupe, bien que minoritaire, de descendants de colons français. Ainsi, les noms de famille Humblot, Rivière et Toinette sont assez courants parmi les « blancs » de l’île. Par conséquent, les principales langues parlées sont le shikomor – langue locale -, le français et l’arabe.
Et, contrairement à ce que l’on pourrait penser, ce ne sont pas exactement les français qui ont créé les clubs de football de la région. Ils ont plus exactement institutionalisé une pratique qui s’est fortement développée, notamment chez les bantous, au cours de la première moitié du vingtième siècle. Deux clubs de football dominent le paysage de Mitsamiouli : l’Apaches Club de Mitsamiouli et le sujet de notre analyse, le fameux Coin Nord de Mitsamiouli. Et en plus, le très beau Saïd Mohamed Cheik Stadium, inauguré en 2007, qui, du haut de ses 2 000 places, accueille les matchs de l’équipe nationale des Comores.
Mais ce qui est très important du point de vue social, c’est le derby entre le Coin Nord et l’Apaches Club. Les deux clubs du nord de l’île s’affrontent quasiment tous les ans – sauf, ce qui est très rare, lorsqu’il y a impossibilité. Plus qu’un match, un mode de vie est affecté par ce match. C’est un des plus chauds derbys des Comores. Car chaque année, des immenses tifos multicolores en 21*29.7 centimètres sont confectionnés. Oui, c’est la dimension d’une feuille A4. C’est sûr que cela ne vaut pas les splendides tifos de la zyleta du Legia Varsovie, mais on fait avec ce que l’on a !
Coin Nord, en rouge et blanc
Le Coin Nord de Mitsamiouli se distingue sur le terrain par son excellence. En effet, le club est le plus sacré de l’histoire du championnat des Comores, avec sept titres en championnat. Fondé en 1960, il a attendu vingt ans pour remporter son premier championnat. Le dernier en date remonte à 2011. Ajoutons à ce palmarès cinq coupes des Comores, une coupe de la Ligue, trois championnats de Grande Comores, et deux Tournois Adcs-Radio de Mitsamiouli plus une coupe CGH, et vous avez le plus beau palmarès de l’Union des Comores.
Les maillots rouges et blancs tronent donc sur le championnat national. Emmenés par le gardien Mahamoud Mroivili, les défenseurs David Humlot et Attoumani Msaidie dans l’axe, le milieu et capitaine Aziz Mmadi et le buteur Issa Nazarali, la colonne vertébrale de l’équipe est donc constituée par des joueurs comoriens. Mais cela ne suffit pas pour réussir en Ligue des Champions, où ils n’ont jamais passé le premier tour, s’arrêtant souvent même en tour préliminaire, comme pour leur dernière participation en 2012. Ils s’étaient fait sortir par l’Ethiopian Coffee, avec une défaite 2-4 en cumulé.
Notons enfin que le Coin Nord Stadium, là où évolue le Coin Nord de Mitsamiouli, n’est que depuis récemment aux normes internationales. Cela a donné par le passé des événements cocasses lors de compétitions internationales. Ainsi, en 2006, alors qu’ils rencontraient en tour préliminaire de Ligue des Champions les mauriciens de l’AS Saint-Louis 2000, ils s’étaient fait éliminer sans pouvoir disputer de match retour à domicile. Une défaite en aller-retour sur un match, il faut bien un épisode de Tour du Monde pour découvrir cela ! C’est dans ce genre de situation qu’on se rend compte que le football européen est privilégié. Et peut-être est-ce cela que le « football vrai ».