Imaginez que vous êtes avant-centre, brésilien, et de la même génération que Garrincha, Pelé, Vava et Zagallo. Et qu’en outre les remplacements en plein match sont interdits. Il paraît alors compliqué de devenir un joueur emblématique. Mais Amarildo a fait tomber ce préjugé. Ce génial inconnu est devenu le héros d’une nation quand Pelé est tombé.
Date de naissance ? Inconnue
La date de naissance exacte de Amarildo Tavares da Silveira est inconnue. En effet, quand certaines sources indiquent une naissance en juillet ou août 1939, l’état-civil le fait naître le 29 juillet 1940. Il grandit dans sa ville de naissance, Campos dos Goytacazes. Et très jeune se passionne pour le ballon rond. Car il souffle à peine ses cinq premières bougies que le ballon est déjà son ami. Il joue partout : chez lui, cassant quelques objets au grand désarroi de sa mère, mais surtout dehors. En effet, c’est comme beaucoup de jeunes dans la rue qu’il commence à taquiner la balle. A l’époque, de toute manière, les centres de formation ne sont pas ouverts avant 13 ans. Cet entraînement sur des terrains cabossés lui donne une maîtrise de balle exceptionnelle. Mais aussi une vision du jeu hors-pair et une résistance aux duels supérieure.
Et quand Amarildo a l’âge d’intégrer un centre de formation, cela ne se passe pas au mieux. En effet, ce n’est pour une fois pas ses parents qui en sont la cause, mais ses entraîneurs. Un certain Fleitas Solich le rejettera du centre de formation de Flamengo. Et ce n’est pas du fait d’une méconnaissance du football. Trente-deux sélections avec le Paraguay, plusieurs centaines de match en Argentine notamment à Boca et une longue carrière d’entraîneur. Très longue, même. Entraîneur du Paraguay dès 1922, Solich n’arrêtera d’entraîner qu’en 1971. Surtout, en 1959-1960, il entraînera le Real de Madrid. Non, si Amarildo se fait rejeter du centre de formation de Flamengo, c’est pour des raisons propre à lui. Solich lui reproche d’avoir une confiance excessive en lui qui le rend insupportable à jouer pour ses coéquipiers.
Montant du transfert ? Inconnu
Mais quand en 1957 celui que l’on surnomme le glorieux météore fait ses débuts avec Botafogo. Et impresionne au cours des six saisons qu’il passe avec le plus vieux club professionnel du Brésil. Formant une attaque de folie avec Zagalo et Garrincha, il fait même partie de quelques listes du sélectionneur du Brésil. Normal pour quelqu’un qui compte 135 buts en 238 apparitions sous le maillot de Botafogo. Et ces performances attirent les regards d’un club européen, le Milan AC. Et tout va se décanter en 1962. Ses sœurs refusent de le laisser partir au Milan. Mais c’est Joao Havelange qui va tout arranger. Récit par le futur président de la FIFA.
Je suis allé voir M. Carraro, qui était un grand avocat et surtout le président du Milan AC.
– Monsieur Carraro, je sais que vous allez bientôt engager Amarildo, alors j’ai un service à vous demander. Si ce joueur était sélectionné pour la Coupe du monde au Chili, est-ce que vous accepteriez de le laisser disponible jusque-là pour nous ?
– Sans problème. Je voudrais juste qu’Amarildo soit assuré au bénéfice du Milan AC, s’il lui arrivait quelque chose au Chili. Et j’ai besoin de votre aide. Pourriez-vous essayer de convaincre ses sœurs qui ne veulent toujours pas qu’il signe son contrat avec nous ?
Joao Havelange, fin négociateur, parvient à faire en sorte que l’assurance couvre bien Amarildo. Et au cours d’un dîner avec le joueur et ses soeurs, il parvient à convaincre ces dernières que l’Europe est la destination idéale pour l’attaquant au profil si peu brésilien et tellement européen. Et pour rendre l’histoire encore plus belle, Amarildo est appelé à la fin de la saison pour la Coupe du monde au Chili. Il sait qu’il sera remplaçant derrière les vainqueurs de 1958. Mais sait aussi qu’il peut garnir son palmarès.
Place dans le onze ? Inconnue
Amarildo ne devrait donc pas jouer de la compétition. Mais il y a un joli petit ange gardien qui vole au dessus de sa tête. Joao Havelange toujours, l’explique bien.
On avait bien fait de s’en occuper, car dès le premier match, Pelé s’est blessé et a dû se retirer pour le reste de la compétition. Heureusement qu’Amarildo était là ! Le bon Dieu avait sans doute mis sa main sur mon épaule !
Car oui, Pelé se blesse ! Et Amarildo doit prendre sa succession le match suivant, associé à Zagallo, Garrincha et Vava. Pelé le reçoit de longues heures durant dans sa chambre. Et arrive à le mettre dans les meilleures conditions mentales. Des conditions mentales excellents, donc, qui réussissent à Amarildo. En effet, pour sa première titularisation en équipe nationale, il inscrit un doublé contre l’Angleterre. Les siens s’imposent 2-1, et Amarildo gagne sa place dans le onze. Il ne marque cependant plus jusqu’en finale contre la Tchécoslovaquie. Dans un match pour l’histoire, il inscrit un très joli but, d’une frappe de l’extérieure du gauche à l’angle des cinq mètres cinquante. Puis offre un caviar à Zito. Le Brésil s’impose 3-1.
Amarildo est champion du monde pour la première fois, le Brésil pour la seconde fois consécutive. Et c’est un exploit pour lui d’avoir joué. En effet, ils n’ont été que douze sur vingt-deux à disputer un match avec le Brésil au cours de la compétition : Gilmar, Djalma Santos, Mauro, Zozimo, Nilton Santos, Didi, Zito, Garrincha, Vava, Zagallo, Pelé et lui.
Palmarès ? Connu !
Une belle revanche pour Amarildo. Helenio Herrera avait en effet affirmé : « Sans Pelé, le Brésil va être faible. D’ailleurs, qui est cet Amarildo ? ». Et l’Espagne fut battue par le Brésil. Grâce à Amarildo.
La suite de la carrière d’Amarildo le verra écumer le championnat italien. Entre le Milan AC, la Fiorentina et l’AS Rome, il inscrit dans un rôle d’attaquant de soutien une soixantaine de buts. Et ne retrouve pas le faste du Chili avec la sélection. En effet, il ne jouera que 23 matchs avec l’équipe du Brésil en tout, et ne marquera que sept fois.
Il revient finir sa carrière dans le championnat brésilien, à Vasco de Gama de 1970 à 1972. Il y met un terme à sa carrière qui l’aura vu remporte un mondial, deux championnats carioca, un tournoi Rio-Sao Paulo, une coupe d’Italie et un Calcio. Plus une finale de Coupe Intercontinentale. Pas mal pour quelqu’un dont certains disaient qu’il ne percerait jamais en pro parce qu’il n’était pas assez fantasque. Finalement, son duo avec le génial Garrincha était parfait. Un joueur plus classique, et un joueur imprévisible.
Aujourd’hui à la retraite, Amarildo n’a pas entraîné ni repris d’activité extra-footballistiques depuis sa retraite sportive. Ce qui ne lui a pas empêché de donner naissance à Ganso. France Football, en 1994, le classera 24ème joueur le plus marquant de l’histoire de la Coupe du Monde. Soit le troisième brésilien du classement…