Thierry Laurey, l’entraîneur du RC Strabourg, a mené son club en Ligue 1. Il revient sur cette performance.
« Strasbourg, promu en L 2 en 2016, va jouer dans quelques semaines en L 1…
Je profite, car c’est un peu inespéré.
Inespéré ?
Oui, mais pas dans le sens de chanceux. Quand Marc Keller (le président) est venu me chercher et m’a présenté son plan, il n’était pas question d’accession. L’objectif était de terminer le Championnat dans les huit premiers.
À quel moment, avez-vous compris que vous effectueriez une belle saison ?
Assez rapidement. Le recrutement a été conforme à ce que je souhaitais. J’ai pu rapidement mettre en place le système que je désirais avec ce 4-4-2 en losange, d’abord avec Gragnic au poste de meneur de jeu puis ensuite avec Boutaïb, un changement qui a apporté beaucoup, qui a permis notamment à mes deux attaquants de défendre sur les axiaux adverses.
Pourquoi ce système ?
Je n’invente rien, et je pense que c’est plus facile de marquer des buts avec des attaquants. On a la meilleure attaque du Championnat (63 buts). Bon, on a pris des buts aussi, 47 au total. Ça fait beaucoup. Je pense d’ailleurs que jamais aucune équipe n’est montée avec ce chiffre (Seul Troyes l’a fait).
Cela signifie que vous avez accepté l’idée du déséquilibre…
Non. Je suis un défenseur de métier, et je ne veux pas fanfaronner parce qu’on a gagné. J’ai voulu qu’on se projette rapidement vers l’avant. Mais je n’ai pas honte de dire que j’ai parfois demandé à mon équipe de balancer. Et pas honte de dire qu’il y avait dans ce Championnat des équipes qui maîtrisaient mieux le jeu que nous. Je pense à Lens, Troyes ou Brest. On avait une équipe très pragmatique. Mais en Ligue 1, il faudra être plus rigoureux. Et prendre moins de buts, car il y a des chances qu’on en marque moins.
Vous aviez connu la joie d’une montée en Ligue 1 avec le Gazélec Ajaccio…
Oui, mais ce n’est pas la même chose. Vraiment. Car c’est mon premier titre. Strasbourg est champion. Et je n’avais jamais rien gagné de ma vie. C’est important. L’idée d’un trophée…
En Alsace, vous aurez plus de moyens pour préparer la saison de L 1 ?
Oui, c’est une certitude avec un budget autour de 30 M€. À Ajaccio, c’était du bricolage, du super bricolage à la Mac Gyver.
Votre carrière d’entraîneur a été marquée par de nombreuses évictions, des galères. Est-ce une revanche ?
Non.
Mais ça ressemble à une carrière enfin lancée ?
Je ne sais pas si elle est lancée. Ce qui est certain, c’est que j’ai rencontré dans ce milieu des personnes qui gâchent ton plaisir, fracassent ta passion. Et c’est très douloureux.
Avez-vous un jour pensé à faire autre chose ?
Jamais. Même après Amiens (2008-2009), quand j’ai connu vingt et un mois de chômage… Je me souviens d’avoir dit à ma femme : “C’est ce que je veux faire, et je continuerai.” Pourtant, c’est dur. Le téléphone ne sonne plus. Les rapports à la maison se tendent. Et puis un jour, ça repart. J’ai retrouvé du boulot grâce à Saint-Étienne qui m’a proposé d’intégrer sa cellule de recrutement (en 2011).
Et aujourd’hui vous êtes en L 1…
Maintenant, il faut y rester. Et essayer de terminer entre la 15e et 17e place. J’ai vu que Dijon s’était sauvé (16e) avec le même nombre de points (37, comme Caen, 17e) que le Gazélec la saison passée (19e et relégué). »