Légende de l’OL et septuple champion de France avec son club, Sydney Govou est un nom que tout supporter lyonnais se doit de connaître par cœur. Loin d’être irréprochable en dehors des jours de match, il a cependant toujours su l’être sur le terrain, répondant présent dans tous les grands rendez-vous de l’imbattable Olympique Lyonnais des années 2002-2008. L’ex-international français a accordé une longue interview à Maxifoot, où il a répondu à un nombre de questions personnelles et d’actualité.
Que devient Sidney Govou ?
Je suis consultant pour Canal +. Sinon, je suis en train de développer ma société de managers sportifs avec un ami à moi.
Sidney Govou entraîneur ou à la direction d’un club, c’est possible un jour ?
Ouais… Ça me botte. Après, je ne suis pas partisan pour qu’on me place pour me placer, quoi. Je veux apporter quelque chose, quelque chose de plus. Pourquoi pas ?
Vous gardez toujours des contacts avec les dirigeants, les joueurs de l’OL ?
J’ai pas mal de contacts encore. Je suis souvent au centre d’entraînement des pros. Je suis ami avec Bruno Genesio, avec tout le staff au club. Les intendants, tous ceux qui ont fait partie de ma génération. Parmi les joueurs aujourd’hui, je suis proche de Max Gonalons, d’Alexandre Lacazette. Ça a changé, mais j’ai gardé des amis au club en tout cas.
Votre carrière a été très riche avec notamment 7 titres de champion avec l’OL. Avez-vous un regret malgré tout ?
Non, je n’ai pas spécialement de regret. Non… S’il faut regretter quelque chose, je pense que sur un ou deux ans, on aurait pu aller titiller une finale de Ligue des Champions. Je pense qu’on avait peut-être l’équipe, à un moment donné pour aller plus loin. La première année, quand on perd contre le PSV Eindhoven (2005, ndlr), l’année d’après quand on se fait éliminer par le Milan AC. Ces deux années-là, je pense qu’on avait potentiellement parlant l’équipe pour faire mieux en Ligue des Champions. Peut-être pas la finale, mais au moins passer le tour où on a été éliminé.
Vous avez connu de sacrées déceptions chez les Bleus. Quelle a été la pire ? La finale perdue en 2006 ou l’abominable Mondial 2010 ?
La Coupe du monde 2010 !
Sans hésiter ?
Ah ouais ! 2010, c’était catastrophique ! C’est plus dur à digérer qu’une défaite en finale de Coupe du monde. Ah oui, oui. Carrément ! C’est une campagne totale qui est ratée. En 2006, la campagne est réussie. Tu te dis que tu vas en finale et que tu peux être champion du monde, mais 2010, c’était vraiment catastrophique…
Si la formation lyonnaise se porte à merveille, le club ne parvient plus à réaliser des bons coups sur le marché des transferts comme ça a pu être le cas par le passé (Abidal, Diarra, Essien, Tiago, Cris, Juninho, etc…). Comment expliquez-vous cela ?
L’explication est assez simple ! Regardez les clubs qui font des grands coups au mercato. Ce sont les clubs qui ont une grosse cellule de recrutement. Voilà. Le recrutement, ce n’est pas une personne ou deux, c’est une multitude de personnes. Quand on voit le recrutement de Monaco, on a vite compris. Monaco, pour moi, c’est ce que faisait Lyon avant. On loue le centre de formation de Monaco, mais il faut aussi regarder les joueurs qu’ils prennent. Ce sont souvent des joueurs qui évoluaient en France et qui sont jeunes. La plupart ne sont pas formés à Monaco mais sont achetés puis revendus derrière. Nous, on a la chance d’avoir gagné en même temps. Eux n’ont pas encore cette chance, je leur souhaite cette année. Mais Monaco est très performant. Les bons coups se font parce que vous avez une cellule de recrutement qui est hyper développée et qui ne laisse rien passer, qui sait flairer les bons coups au bon moment.
Au début de la saison, l’OL présentait un budget de 235 M€, ce qui en fait un gros club européen d’un point de vue financier. Pourtant, on a l’impression qu’il y a un plafond de verre qui empêche le club de progresser sur la scène continentale. A quel niveau situez-vous ce frein ?
Les performances ! Le frein, ce sont les performances. C’est bien d’avoir des joueurs du centre de formation. Mais à un moment donné, au niveau européen, il faut avoir une culture européenne.
Pourtant, vous aviez cette culture européenne de votre temps…
(Il coupe) On l’avait, parce qu’on avait des Brésiliens, mais aussi parce qu’on n’avait pas que des joueurs français. Il y avait des joueurs étrangers. Il y avait par exemple Kim Kallström, TIago, Diarra, Essien. On avait cette culture qu’on n’a pas forcément en France. Moi, ce sont ces joueurs-là qui m’ont apporté cette culture de la gagne. On en revient à ça, mais c’est le recrutement (Rires).
A ce titre, pensez-vous que l’OL peut gagner la Ligue Europa cette année ?
Oui. Mais je pense qu’on sous-estime les Turcs.
Vous pensez que Besiktas peut poser de sérieux problèmes à l’OL ?
Ah, moi, je vous dis un truc, ça va être très compliqué ! Il va falloir faire une grosse différence à l’aller.
Si victoire il y a, pensez-vous que ce serait la plus belle page de l’histoire du club ? Un titre européen, le premier pour l’OL, le troisième dans l’histoire du football français…
Non, puisque pour moi, la Coupe de l’UEFA… Je ne dis pas que ça n’a pas de valeur, mais je ne considère pas cette compétition comme un titre majeur. La majorité des équipes, il faut dire la vérité, ne la joue pas à fond, à part quand elles arrivent en quarts de finale. A chaque fois qu’un club moyen la joue à fond, il l’a gagnée, donc…
Vous avez récemment affirmé votre soutien à Bruno Genesio. Ne pensez-vous pas que la proximité de Genesio avec certains de ses joueurs peut constituer une limite s’il reste sur le banc ?
Non ! De toute façon, est-ce qu’il a le choix ? Il n’a pas non plus pléthore de choix. Il doit faire jouer les joueurs qu’il a sous la main.
Donc pour vous, Bruno Genesio n’est pas un problème à terme ?
Moi, je ne considère pas que ce soit un problème, non. Je ne suis pas dans les petits papiers. Je ne sais pas comment le club recrute, si c’est lui qui fait le recrutement ou pas. Mais c’est pareil. Si vous lui donnez, je ne sais pas, je vais dire une connerie, je ne sais pas… (Hésitation) un Dzeko, ou des joueurs comme ça, il les fera jouer ! A partir du moment où vous lui donnez des joueurs qui sont uniquement sortis du centre de formation, ce qui est très bien au demeurant, cela limite les choix de l’entraîneur. S’il a le choix, il pourra en faire des bons. Là, en l’occurrence, il n’en a pas énormément, il faut se dire la vérité. Il a beaucoup de joueurs qui sont du cru, donc forcément, il va les faire jouer.
Ne trouvez-vous pas qu’on a trop facilement tendance à s’enflammer pour des joueurs certes talentueux mais qui sont très loin d’avoir les références que vous aviez il y a dix ans ?
Ouais… Après, ce n’est pas la même génération. On n’avait pas forcément le même groupe. Nous, on avait un groupe avec beaucoup, beaucoup, beaucoup de caractère.
C’est le caractère qui faisait la différence selon vous ?
Ouais, on avait beaucoup de caractère (sûr de lui). Je ne dis pas qu’ils n’en ont pas, mais au niveau du caractère, c’était vraiment autre chose.
Le fait de «chouchouter» Lacazette n’est-il finalement pas un effet pervers ? Sans concurrence, peut-il permettre à l’OL de franchir un cap ?
Je pense que lorsque vous avez un joueur star dans votre équipe, il faut le mettre bien. A mon sens, il aurait fallu recruter un deuxième attaquant de haut niveau quand même. De haut niveau ! (Il insiste). Pas un jeune, mais vraiment un attaquant de haut niveau. Cela aurait permis à Lacazette de souffler de temps en temps, de lui imposer une concurrence…
Pour revenir sur votre carrière, vous auriez préféré remporter un titre européen avec l’OL ou un titre avec les Bleus ?
(Il hésite) Un titre européen avec l’OL.
Êtes-vous sûr ?
Non… Mais s’il fallait choisir… Ouais, j’aurais aimé les deux ! Mais un titre européen avec l’OL. La Ligue des Champions. Si on parle de la Coupe de l’UEFA, ça ne m’aurait pas intéressé. J’aurais préféré la Ligue des Champions avec l’OL, ouais !
L’équipe la plus forte, le grand Lyon ou le PSG version QSI ?
Euh… S’ils font aussi bien que nous, ils seront plus forts même si on ne va pas se mentir, au niveau qualitatif, le PSG actuel est plus fort que le Lyon de l’époque. Quand on prend joueur par joueur, on n’a pas d’équivalent. Non, non, ils sont meilleurs que nous. Après, ce n’est parce qu’on a onze meilleurs joueurs qu’on a une meilleure équipe.
Juninho ou Zidane ?
Ouh… (Très long moment d’hésitation) Juninho ou Zidane ? J’ai envie de dire… Oh p*****, c’est chaud quand même !
Joker ?
(Il réfléchit longuement) Là, c’est chaud ! Je dirais Juni, ouais, puisque je l’ai côtoyé au quotidien. Après ouais, je pense que Zizou est meilleur que Juni. Mais Juni, c’était quand même un extraterrestre !
Quel est votre meilleur souvenir personnel ? Le but victorieux du 3-2 dans le Chaudron lors de la 9e journée en 2004-2005 ou le doublé contre l’Italie (3-1) en septembre 2006 (quelques semaines après la défaite en finale du Mondial 2006 lors des éliminatoires de l’Euro 2008) ?
Le 3-2 à Sainté ! (Sans aucune hésitation)
Vous vous rappelez du doublé contre l’Italie ?
Ouais, ouais, je m’en souviens ! Je n’ai pas vu comment j’ai marqué le second but puisque j’ai reçu un choc à la tête (avec Cannavaro, ndlr) mais le 3-2 contre Saint-Etienne, dans les arrêts de jeu en plus !
Pour finir, y avait-il penalty sur Nilmar (face au PSV Eindhoven) ?
Ah bah ! S’il y avait la vidéo, on aurait peut-être pu passer le tour (Rires) !
Est-ce que, juste pour cette action, vous êtes pour la vidéo dans le football ?
Moi, oui ! Mais dans un cadre bien défini. On ne peut pas intervenir sur une touche, sur une faute au milieu du terrain, sur n’importe quoi. Mais uniquement sur des choses bien précises. Les actions dans la surface, but, pas but, main, pas main, but refusé ou accepté pour un hors-jeu ou non, je trouve que c’est important.